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Pub digitale culturelle : doit-on s’inquiéter ?

November 22, 2022

Les nouvelles ne sont pas bonnes outre-Atlantique pour certaines publicités numériques, en particulier dans le secteur culturel. D’un côté, une étude semble indiquer que la confiance pour les médias sociaux s’effondre, de l’autre, les statistiques du 3ème trimestre 2022 montrent que les coûts d’acquisition sur Google explosent pour le secteur des arts et du spectacle. Une double alerte qui interroge sur les pratiques en cours…

Les nouvelles ne sont pas bonnes outre-Atlantique pour certaines publicités numériques, en particulier dans le secteur culturel. D’un côté, une étude semble indiquer que la confiance pour les médias sociaux s’effondre, de l’autre, les statistiques du 3ème trimestre 2022 montrent que les coûts d’acquisition sur Google explosent pour le secteur des arts et du spectacle. Une double alerte qui interroge sur les pratiques en cours…

La confiance dans les médias sociaux chute brutalement

Nous avons déjà tous conscience de la lassitude des gens face au côté répétitif et intrusif des annonces mal ciblées, qui se traduit par une chute constante de la confiance dans la publicité numérique. Mais maintenant, ce sont les véhicules de ces pubs, dont leurs propriétaires ont tiré des dizaines de milliards de profit, qui sont affectés par une chute drastique de la confiance qu’ils inspirent. 

La confiance dans les médias sociaux a chuté de près de 40%

Selon une étude de l’organisme Insider Intelligence menée en septembre 2022 aux USA auprès des utilisateurs des médias sociaux, la confiance dans les 9 principaux d’entre eux s’est effondrée de près de 40% en 2 ans ! En queue de la classe, le cancre Facebook est tombé à 18% d’indice de confiance digitale contre 30% en 2020. Même le premier de la classe, LinkedIn, s’est tassé dans les mêmes proportions, à 31% d’indice de confiance vs. 50% en 2020. Et pour plusieurs réseaux (LinkedIn, YouTube, Reddit, TikTok et Facebook) la chute s’est accélérée cette année et dépasse un tiers en 12 mois. Et on peut imaginer le sort de Twitter dans les mois qui viennent…

US social media users who agree that social platforms protect their privacy and data
Les utilisateurs américains des médias sociaux qui sont d'accord pour dire que les réseaux sociaux protègent leur vie privée et les données, 2022-2022 (Insider Intelligence)

La confiance digitale est définie comme le niveau de crédit qu’accordent les gens à une plateforme pour protéger leurs données et leur fournir un environnement sûr pour qu’ils puissent créer ou interagir avec des contenus. Les trois paramètres de cet indice composite qui ont le plus chuté en 2022 sont le respect de la vie privée, la sécurité et… la pertinence des pubs qui sont adressées à leurs utilisateurs. 

C’est le problème des réseaux sociaux, diront certains. Sauf que cette chute de confiance porte sur des paramètres très liés à la pub, et affecte donc les conditions de réception et de perception des messages émis par les nombreux annonceurs qui utilisent ces canaux pour communiquer avec leurs publics (sans oublier l’éventuelle proximité de fake news et d’échanges d’injures qui jettent aussi le discrédit sur les pubs qui les côtoient…).

Le coût d’acquisition des leads sur Google explose pour les ICC

Les taux de conversion des publicités sur Google, incluant aussi bien les mots-clés que YouTube, sont en chute libre. Tous secteurs confondus, les taux de transformation ont chuté de 14% en moyenne au 3è trimestre 2022 par rapport à 2021, et seuls deux secteurs ont vu leur taux de conversion croître sur cette période. 

Les coûts d'acquisition des leads sur Google dans le secteur Arts / Entertainment ont augmenté de 134%

Plus embêtant pour le secteur culturel, les taux de conversion se sont effondrés dans le secteur "Arts/entertainment", entraînant une hausse vertigineuse des coûts d’acquisition de + 134% en un an ! Le deuxième secteur le plus sinistré, celui des voyages, n’a vu ses coûts exploser « que » de + 69%, soit moitié moins que ceux du secteur culturel.

Si le phénomène d’agacement envers la pub a sûrement une influence sur cette situation, il s’agit d’une tendance longue, apparue depuis longtemps. En revanche, la perte de confiance dans les médias sociaux, elle, s’accélère actuellement, comme on l’a vu plus haut. Il faut compter par ailleurs avec l’inflation « naturelle » des médias, traditionnellement forte chez les Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft), et également incriminer l’attentisme des consommateurs, justement face à l’inflation qui les contraint à remettre en perspective leurs choix budgétaires. Dans la culture, on peut y rajouter la lenteur à revenir aux anciens comportements après la pandémie… si tant est qu’on y revienne un jour.

Si ces phénomènes sont plus diffus en France – ou mal mesurés… –, il ne fait aucun doute qu’ils vont y sévir également. De ce fait, le principe trop fréquemment utilisé – dans la culture aussi, de manière contre-intuitive – d’arroser le maximum de gens avec des messages indifférencié, ou « élaborés scientifiquement » par l’intelligence artificielle, va vite trouver ses limites. Peut-être l’époque est-elle venue d’avoir recours à l’intelligence humaine et au bon sens, qui suggère (preuves à l’appui) qu’excéder les gens à force de sollicitations non souhaitées finit par entraîner une réaction de rejet, pour les coupables heureusement, mais aussi pour les autres, hélas.

Nous aurions donc tort de penser que ce phénomène ne touche que les Etats-Unis. Les indicateurs de méfiance envers les réseaux sociaux et les coûts d’acquisition sont en hausse constante, pandémie ou pas. Une gestion plus fine des cibles et une meilleure intelligence des messages, sans oublier un meilleur respect des règles du RGPD, permettrait de faire baisser à la fois la résistance des gens… et les budgets de communication !

Pub digitale culturelle : doit-on s’inquiéter ?
Eric de Rugy
Eric est l’un des spécialistes français de la communication marketing intégrée. En 2015, il a cofondé Delight, qu’il préside et dont il supervise la stratégie. Il préside également la fédération des Jeunes Organisations Innovantes de la Culture et de l’Entertainment (JOICE), qu’il a aussi cofondé, afin de faire entendre la voix des start-ups dans l’écosystème de la culture. Il a présidé pendant 12 ans le club Marketing & Com d’HEC Alumni.
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