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La culture ne doit pas ignorer l’intérêt d’un vrai CRM

April 12, 2022

Si la définition du CRM peut effrayer le monde de la culture, il s’agit d’une technique relationnelle éprouvée qui, si elle est bien utilisée, peut l’aider à « cultiver » son public.

Si la définition du CRM peut effrayer le monde de la culture, il s’agit d’une technique relationnelle éprouvée qui, si elle est bien utilisée, peut l’aider à « cultiver » son public.

L’univers du marketing est rempli d’anglicismes qui masquent, pour le commun des mortels, des pratiques vertueuses… ou vicieuses, selon l’usage qui en est fait. Les solutions proposées par Delight s’apparentant par certains côtés à un logiciel CRM, il est pertinent de poser la question : qu’est-ce qu’un CRM et à quoi cela sert-il ?

La définition du CRM, Customer Relationship Management en anglais, c’est la Gestion de la Relation Client GRC. Son objectif est de fidéliser les clients pour générer des opportunités de ventes à long terme. Il n’est pas inintéressant de noter que les Anglais distinguent le terme « customer » et le terme « client ». Le premier fait référence à une « habitude » (custom) d’achat auprès d’un même vendeur, le second induit une forme de dépendance, en référence à son origine latine. C’est sans doute pour cela que la notion de « gestion de la relation client » hérisse le poil de tous ceux qui ont des activités commerciales dans des univers où la dimension mercantile est secondaire à leurs yeux. C’est le cas de la culture, où on préfère les notions de visiteur, spectateur, participant, amateur, abonné, etc. Seul le dernier induit pourtant cette idée de récurrence de visite ou d’achat.

De l’intérêt de créer une habitude

Or, à la base du customer relationship management repose le principe – maintes fois vérifié sur le plan statistique – qu’il est plus facile de générer du chiffre d’affaires auprès d’une personne qui a « coutume » d’acheter vos services que de conquérir quelqu’un qui n’est jamais entré en relation avec vous. Une attitude qui n’a pas toujours prévalu dans le monde de la culture. On y estimait que l’attractivité des œuvres et le travail de la critique suffisaient pour remplir les manifestations ou pour vendre les objets et services culturels. La prise de conscience de cette nécessaire évolution est désormais amorcée. Aujourd’hui, de plus en plus d’acteurs culturels comprennent l’importance d’une mentalité de « service client » et de la mise en place d’outils de gestion commerciale ad hoc via un CRM adapté.

Ces outils dépendent évidemment de l’interaction possible avec le client. Traditionnellement, le courrier, le téléphone ou les contacts en face à face constituaient l’essentiel de ces interactions avec les clients ou les prospects. De nos jours, les décisions d’achat, y compris de produits et services culturels, sont de plus en plus influencées par le web et par les réseaux sociaux. Il serait donc déraisonnable, voire risqué, de se priver de solutions CRM utilisant ces canaux. D’autant que ceux-ci peuvent grandement améliorer la gestion de la relation client, que l’on aime ou non cette définition du CRM.

L’enjeu consiste avant tout à recueillir des données clients, en quantité raisonnable et en toute transparence, en phase avec les exigences du RGPD. Ces « datas » sont de plusieurs types :

  • Caractéristiques descriptives comme le sexe, l’âge ou le code postal de la personne. Ces données clients sont obtenues par interrogation directe, en ligne, au téléphone ou autre,
  • Données comportementales telles que le type d’achats effectués ou de produits culturels consommés, à quelle fréquence, etc. Ces datas sont généralement issues de la mise en place d’un outils CRM adapté,
  • Informations plus fines sur les attitudes ou les centres d’intérêts des gens. Elles peuvent être recueillies par l’intermédiaire de cookies permettant de suivre leur navigation sur internet, les images ou les mots qui les font réagir, le contenu des avis qu’ils ont postés, etc.

Il y a CRM et CRM…

Cette étape de recueil est essentielle car la qualité de la relation client dépend de l’exactitude et de la fiabilité des datas recueillies. A une époque où les logiciels de gestion de la relation client peuvent agir en temps réel, les moindres erreurs ou approximations peuvent peser lourdement dans la perception du message reçu. Or un client « déshabitué » est généralement perdu pour longtemps…

C‘est pourquoi il ne suffit pas de mettre en place un logiciel de CRM pour faire du CRM efficace ou intelligent. En effet, on a pu constater à quel point les excès des campagnes marketing en ligne, en particulier en retargeting (envoi d’une relance à un internaute qui a visité un site ou a amorcé une démarche d’investigation ou d’achat) ont eu un effet néfaste sur les gens visés. Trop insistantes, trop intrusives, poussant des messages trop basiques, indifférenciés, voire stupides, elles ont incité plus de 40% des Français à s’équiper de bloqueurs de pubs sur leurs appareils.

Tout comme la publicité, un CRM efficace suppose de la finesse, de la pertinence, de l‘écoute… C’est toute la valeur ajoutée de l’analyse des données clients, à condition qu’on mette le support clients au service d’une relation saine et équilibrée et non pas d’un harcèlement contre-productif.

Cette relation saine et équilibrée repose avant tout sur le respect de la vie privée de chacun et sur la protection des données. C’est la condition minimale pour installer la confiance et obtenir de la part des gens qu’ils acceptent de recevoir des messages censés correspondre à leurs envies ou leurs attentes. Ce consentement, exprimé par l’intermédiaire de ce qu’on appelle des opt-in, autorise les organisations à envoyer des messages dédiés à ces individus ayant exprimé cet accord.

Hélas, les modes de recueil de ces consentements, inspirés des techniques des GAFA, sont parfois un peu tordus et pas très transparents. De ce fait, ils engendrent de l’indifférence dans le meilleur des cas, mais plus souvent une méfiance généralisée. Celle-ci rejaillit négativement sur l’ensemble des activités en ligne des gens, affectant des secteurs qui pourraient bénéficier d’un meilleur accueil de leur part.

La culture, victime des excès du marketing traditionnel

C’est le cas du monde de la culture. Faute de savoir à quoi ils s’engagent et qui sont les mystérieux « partenaires » dont ils sont supposés accepter les envois, les gens préfèrent refuser leur opt-in. Il se privent ainsi d’informations ou d’offres culturelles pouvant les intéresser et privent les acteurs culturels de pouvoir les leur envoyer. La gestion de la relation client requiert donc du doigté, de la patience et de la mesure… dans les deux sens du terme : savoir modérer ses envois et mesurer les retours avant de lancer une nouvelle salve de messages.

Le problème, c’est que le milieu culturel ne dispose pas toujours des équipes marketing formées à ces subtilités. Souvent, le département CRM regroupe de multiples autres tâches qui empêchent ses responsables d’acquérir une compétence poussée dans tous les domaines. Or les techniques évoluent rapidement et de nouveaux outils CRM plus avancés apparaissent régulièrement, comme ceux de Delight par ex. Cela nécessite de la part des professionnels une vigilance accrue.

En définitive, si la définition du CRM semble le condamner à des missions répétitives et à faible valeur ajoutée, c’est en fait un outil beaucoup plus subtil qu’il y paraît. Utilisé à bon escient et avec de bons outils, il permet de nouer une relation plus riche et plus durable avec les « coutumiers ». Ceux-ci, à condition qu’on ne les trahisse pas, ont toutes les chances de jouer un rôle d’ambassadeur auprès de leur proche. C’est ainsi que des livres, des films, des spectacles ou des événements disposant d’un faible capital de notoriété pourront bénéficier d’un précieux bouche à oreille.

La culture ne doit pas ignorer l’intérêt d’un vrai CRM
Eric de Rugy
Eric est l’un des spécialistes français de la communication marketing intégrée. En 2015, il a cofondé Delight, qu’il préside et dont il supervise la stratégie. Il préside également la fédération des Jeunes Organisations Innovantes de la Culture et de l’Entertainment (JOICE), qu’il a aussi cofondé, afin de faire entendre la voix des start-ups dans l’écosystème de la culture. Il a présidé pendant 12 ans le club Marketing & Com d’HEC Alumni.
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