Saison 2

S02E18 - Sophie Hazebroucq, Productrice & DG de Ruq Spectacles

Le point commun entre Michael GREGORIOGaspard PROUSTVincent DEDIENNE et Thomas VDB ? C’est Ruq Spectacles, la « boite de prod » de spectacles de Laurent RUQUIER, dirigée depuis le premier jour par Sophie HAZEBROUCQ. Sophie revient bien sur de son parcours, mais aussi sur les premiers jours de ce projet, intimement liée à l’envie de Laurent de faire remonter sur scène Marie LAFORET. Cet esprit « coup de coeur » pour des artistes reste aujourd’hui encore le moteur unique de Ruq Spectacles… Et aucune raison de changer, devant le succès dingue de chacun des artistes défendus par Sophie, Laurent et leurs équipes. C’est l’avant-avant dernier épisode de la saison 2 de SOLD OUT et ça donne encore plus envie de profiter de chaque minute de cet échange. Prenez soin de vous <3

Sold Out Sophie Hazebroucq Ruq Spectacles

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SOLD OUT - Saison 2, épisode 18 : Sophie Hazebroucq

avec Sophie Hazebroucq, Directrice Générale de « Ruq Spectacles ».

Episode enregistré dans les bureaux de Delight, à l’été 2021.

Bonjour ! Bienvenue dans l’un des derniers numéros de « Sold Out » pour cette saison (il en reste encore quelques-uns jusqu’à la fin du mois de juillet). Aujourd’hui, on va parler d’une Société de Production de Spectacles. Venant de l’extérieur, on pourrait croire qu’elle est spécialisée dans l’humour (c’est aujourd’hui la réalité de son line-up) mais en réalité, je crois que cette « boîte de Prod’ » fonctionne surtout au « coup de cœur » …

Bonjour Sophie Hazebroucq !

Bonjour Marc ! Merci pour l’invitation !

Tu es Directrice Générale de Ruq Spectacles qui est, à l’origine, la Société de Productions de Laurent Ruquier, c’est bien ça ?

Exactement !

Une « Société de Production qui fonctionne au coup de cœur ». Est-ce une bonne manière de vous définir ?

Tout à fait, c’est ça !

Aujourd’hui, dans votre line-up, il y a Vincent Dedienne, Gaspard Proust, Michaël Gregorio, Thomas VDB et, de temps en temps, des spectacles comme « Les Parisiennes », pour lesquels vous avez vraiment envie de mettre en place une Production…

En gros, on « détecte » un Artiste et on se dit qu’on a envie de l’aider, c’est ça ?

Oui ! Ce sont des occasions et des rencontres…

On va parler de tout ça dans cet épisode de « Sold Out », qui commence maintenant !

Sophie Hazebroucq, premier billet vendu ?

Je pourrais dire à la fin des années 80, quand j’étais « relais » pour le Théâtre des Arts de Cergy-Pontoise, au lycée. Ce rôle consistait à promouvoir ce théâtre pour lui permettre de vendre des abonnements.

En réalité, c’était plutôt en 2005, quand j’ai eu la chance de gérer la Production des concerts de Marie Laforêt, que Laurent Ruquier avait convaincue de remonter sur scène.

Dernier billet vendu ?

Je dirais Thomas VDB à l’Européen : c’est le dernier report de grosse série qu’on vient de faire en cette période.

Je m’appelle Sophie Hazebroucq. Je suis Directrice Générale de Ruq Spectacles, une société dont l’actionnaire majoritaire est Laurent Ruquier.

Salut Sophie !

Salut Marc !

Ça a commencé très tôt cette vocation : au lycée, déjà (je l’ai appris en t’écoutant tout à l’heure), tu avais cette envie de « partager le Spectacle » avec tes camarades de jeu…

Je l’avais un peu oublié. C’est vrai que c’était surtout l’envie de découvrir un Milieu que je ne connaissais pas.

Quand on regarde ton parcours, on se rend compte que beaucoup de choses ont commencé quand tu as rencontré Laurent Ruquier dans les Médias. Peut-être peut-on parler très rapidement de la « période d’avant ». Que s’est-il passé qui pouvait (ou non) te prédestiner au Monde du Spectacle ? Quelles ont été tes études après le lycée ? Quelles ont été tes premières expériences ?

J’avais plutôt envie d’aller dans le Milieu Audio-Visuel.

J’ai fait une Ecole de Commerce parce que je me disais que je trouverais du travail avec cette formation. Très vite, j’ai préféré faire des « petits boulots », que j’ai enchaînés dans le Milieu Audio-Visuel.

J’ai commencé comme Assistante de Réalisation, Chargée de Production, Monteuse de films documentaires et publicitaires… jusqu’à ce que je « tombe », en 1996, sur une annonce pour être Coordinatrice de Production d’un spectacle à l’Exposition Mondiale de Lisbonne. J’ai été embauchée par Gilles Petit chez Juste Pour Rire.

Cette mission a duré deux ans. Elle a été très instructive.

Je suis restée encore un peu chez Juste Pour Rire : Gilles avait besoin d’être assisté sur la Direction de la Société et la Production.

C’est là que s’est fait le lien avec Laurent Ruquier…

Voilà. Chez Juste Pour Rire, j’ai été Directrice de Production de son dernier « seul en scène ». Je n’avais pas vraiment de plan de carrière (je m’imaginais peut-être faire une année sabbatique, je ne savais pas trop…), et Laurent cherchait une Assistante Personnelle.

Quand il m’a proposé de le devenir, je me suis dit : « Oui ! Il a du talent ». Je sentais qu’on pouvait s’entendre humainement. C’était le cas puisque ça fait maintenant plus de 20 ans qu’on travaille ensemble.

Tu nous rafraîchis la mémoire ! Nos plus jeunes auditrices et auditeurs ne le savent peut-être pas, mais Laurent Ruquier faisait beaucoup de Scène autrefois ! Ce n’était pas seulement un « homme de Médias » …

Ce n’était pas forcément ce qu’il préférait faire, mais il a fait beaucoup de Scène.

« Ce n’était pas ce qu’il préférait faire » : c’est intéressant ! C’est vrai qu’aujourd’hui, comme il est très présent à la Télévision et à la Radio, on a tendance à oublier qu’il a fait de la Scène. D’ailleurs, je crois qu’il a complètement « lâché la Scène » il y a quinze ans, c’est ça ?

Ça fait même plutôt vingt ans ! [Rires] Vingt-et-un ans exactement.

La rencontre avec Laurent Ruquier se fait, et tu es son Assistante Personnelle. C’était quoi le « boulot » de l’Assistante Personnelle d’une Personnalité comme Laurent ?

C’était à la fois l’assister sur des organisations de séjours en vacances pour ses Chroniqueurs, participer aux castings des pièces de théâtre qu’il commençait à monter, suivre les bouquins qu’il écrivait à ce moment-là…

L’assister sur tous ses « projets parallèles », et faire en sorte que « les trains arrivent à l’heure » …

Voilà, c’est ça !

Il était en train de quitter France Inter pour arriver sur Europe 1. Il était au début de sa « carrière télé » : il était sur CANAL + avec Marc-Olivier Fogiel.

En 2005, un vrai projet concret : « faire remonter Marie Laforêt sur scène » (un gros coup de cœur). Peux-tu nous rappeler ce qu’il s’est passé à ce moment-là ?

Laurent avait invité Marie Laforêt dans l’une de ses émissions. Il rêvait de la voir monter sur scène et la tannait un peu avec ça, jusqu’à ce qu’elle lui dise : « D’accord, mais c’est toi qui me produis ! », chose à laquelle Laurent a tout de suite dit : « OK ! » [Rires]

Comment dire « non » à ça ? [Rires]

Il est venu me voir et m’a dit : « Tu ne faisais pas de la Production ? ». Il avait oublié : ça faisait cinq ans que je n’en faisais plus !

J’ai dit : « OK ! ». On a eu la chance d’avoir le Théâtre des Bouffes Parisiens : Jean-Claude Brialy avait repoussé son « seul en scène » d’une semaine pour nous donner ce créneau en septembre.

En mai, tout s’est « mis en branle » pour déposer une demande de licence, créer une petite structure capable de produire ses concerts, trouver des Musiciens…

Cela faisait quand même 33 ans que Marie Laforêt n’avait pas fait de scène, il fallait donc vraiment tout recréer.

C’était passionnant ! Pour Laurent et moi, c’est l’un des meilleurs souvenirs professionnels. C’était une Artiste vraiment très forte. Elle savait ce qu’elle voulait dans tous les domaines, aussi bien sur scène que concernant les lumières, son affiche… Elle a réussi à faire un spectacle très touchant et très beau.

Être Productrice de ce spectacle signifiait « accompagner l’Artiste pour faire en sorte que ces volontés soient traduites dans la réalité », et aussi lui dire parfois : « Ce ne sera pas possible » …

Ce rôle a largement été pris en charge par Laurent Ruquier, qui connaît son Répertoire par cœur et a pu insister pour avoir quelques chansons qu’elle estimait peut-être « valoir moins le coup » (j’assume effectivement ce rôle dans le travail que je fais actuellement). Sur ce premier concert, c’est davantage Laurent qui a eu ces discussions avec Marie.

Là, mon travail avait consisté à faire en sorte de trouver les bons contacts à lui présenter (des Arrangeurs, des Musiciens, des Eclairagistes, un Attaché de Presse…), et de mettre en place la Billetterie…

Je me souviens que c’était une époque où on était « très dans l’Artisanat » : on avait des billets en papier pour les invités. On se retrouvait parfois à gommer des numéros de places sur nos talons et nos billets pour déplacer tel ou tel invité !

Ça a été un grand succès. Beaucoup de personnes sont venus voir le spectacle !

C’était aussi une « école » pour tout ce qui allait suivre… C’est aussi là où tu t’es dit : « Ce serait peut-être pas mal de continuer ! »

Oui ! Suite à cette série de concerts, pas mal d’Artistes sont « venus nous voir ».

Laurent avait une émission sur les Imitateurs. On est donc allés voir Michaël Gregorio qui faisait quelques passages au Don Camillo. Il cherchait un Producteur. On s’est dit qu’il avait beaucoup de talent, et qu’il fallait l’accompagner !

Laurent avait eu « du fil à retordre » pour entrer dans ce Milieu. Il avait donc à cœur d’aider de jeunes Artistes qui arrivaient sur le Marché…

C’est ça. En 2005, c’est le moment où Laurent est à la télé et à la Radio sur Europe 1… tout marche formidablement bien pour lui. C’est vrai que ça n’a pas toujours été très facile au début pour lui, et il se dit : « Moi, je suis tiré d’affaires, j’ai envie de rendre un peu ce qu’on m’a donné… ». C’est un peu ça l’objectif de cette « boîte de Prod’ », non ?

Oui, exactement !

Au départ, il n’y avait vraiment aucune pression de rentabilité. L’objectif était de « faire de beaux spectacles en aidant de jeunes Artistes à trouver leur Public et à obtenir la reconnaissance qu’ils méritaient ».

Vous ne vous êtes pas « facilité la vie » avec Michaël Gregorio : c’est un Imitateur qui imite plein de chanteurs. Cela implique un Groupe, des lumières… C’est déjà une « grosse Prod’ » ! C’est beaucoup plus de Prod’ qu’un One Man Show, finalement…

C’est vrai que dès le début, on a voulu mettre des moyens dans la création d’un « vrai spectacle ».

On aurait pu laisser Michaël Gregorio avec ses bandes-son comme il faisait jusqu’à lors. Lui-même avait très envie de Live et on a dit : « OK ! ». Même si on a commencé dans la petite salle du Café de la Danse et qu’il n’avait aucune notoriété, on a tout de suite mis en place ce Groupe (il était accompagné de quatre Musiciens dont la majorité sont d’ailleurs encore là aujourd’hui). Il lui fallait aussi un Ingénieur du Son, un Ingénieur-Lumières…

Finalement, quand on regarde votre line-up, il n’y a jamais d’échec (en tout cas, dans les Artistes que vous suivez dans le temps) : Michaël Gregorio continue de remplir des Zénith (c’est vraiment un Artiste qui « grandit » et continue d’avoir du succès), Gaspard Proust a maintenant une Fan Base immense, et vous l’avez fait « grandir » au fur et à mesure de la même manière que Michaël, Vincent Dedienne, n’en parlons pas…

Thomas VDB (l’une des dernières signatures) est peut-être « l’exception » (non pas pour le succès que l’on souhaite énorme) : c’est un Artiste qui avait déjà une certaine notoriété avant…

C’est vrai que notre « marque de fabrique » est plutôt d’aider des Artistes très débutants, qui n’ont pas de notoriété et quasi pas de spectacle à développer. D’ailleurs, Laurent avait dit à Michaël Gregorio qu’il « ferait » Bercy, et on a fini par « faire » deux Bercy, dix ans à peine après ses débuts.

Thomas VDB, c’est une autre histoire…

J’ai appris qu’il n’avait plus de Producteur (je ne vais pas « piquer » les Artistes chez d’autres Producteurs…), et je trouvais cela tellement dommage pour quelqu’un d’aussi talentueux, que j’en ai parlé à Laurent en espérant qu’il l’aime aussi (c’est quand même important pour moi que Laurent « valide » les Artistes, comme lui me demande si je suis « partante » pour tel ou tel Artiste).

Il était « super d’accord » pour Thomas VDB, donc ça s’est fait comme ça…

Dans l’histoire de Ruq Spectacles, il y a une anecdote marrante. Le jour où tu as annoncé à Laurent Ruquier que la « boîte » était rentable et qu’elle ne perdait plus d’argent, il était presque gêné… c’est ça ?

Oui ! Ça l’a surpris !

Il ne faisait tellement pas ça pour « gagner des sous » qu’il s’est dit : « On va encore en gagner comme ça ? » [Rires]

[Rires] C’est un « beau problème » !

C’est ça ! Il a été assez étonné…

Justement… Ce qui est intéressant, c’est que quand on « gagne un petit peu de sous » et qu’on est rentable, cela permet d’investir.

J’ai envie qu’on partage avec les auditeurs ce qu’il s’est passé pour vous avec cette crise sanitaire, car vous étiez dans une situation assez particulière. Vous aviez investi sur ce qu’on appelle la « préproduction » de trois spectacles, et « badadoum ! », la crise sanitaire et le confinement arrivent au printemps 2020…

Vous n’avez donc pu jouer qu’entre zéro et cinq fois…

On avait joué cinq fois avant le 13 mars 2020.

Dès qu’on pouvait reprendre, on reprenait. On a repris un peu à la rentrée avec Michaël, mais il a fallu refaire des répétitions (après huit mois sans jouer, il y a forcément des choses qui ont changé au niveau de l’écriture).

Michaël a profité de ce temps pour améliorer certaines choses et développer de nouvelles idées.

Il a aussi fallu remonter un kit technique. Quand on a un kit technique assez important avec des écrans et des vidéos, il ne faut pas que les équipes techniques soient « mises devant le fait accompli ». Il faut préparer le matériel, il faut au minimum un prémontage pour pouvoir arriver le jour du show et que « ça roule » !

On ne « claque pas des doigts » pour refaire le spectacle après six mois d’interruption !

Comme Vincent Dedienne « fait » beaucoup de films, on a pris la décision de créer le spectacle sans savoir quand on pourrait le jouer. On a heureusement eu des aides. On a quand même été beaucoup aidés dans notre secteur.

Je crois que c’est bien de le rappeler, en effet…

Maintenant, on est contents de pouvoir repartir !

Dès que les restrictions seront levées, vous serez repartis ?

On a vraiment eu à cœur de garder nos options jusqu’au dernier moment.

Dès qu’on ne pouvait plus, on les repoussait. Dès qu’on pouvait jouer, on savait que des salles pleines nous attendaient, avec des spectateurs qui avaient leur billet et n’attendaient que d’entrer dans la salle !

En parlant de « billets », quand on est une « boîte de Production de Spectacles », quel est le rapport à la Billetterie ? A-t-on tendance à se dire : « Notre boulot est de faire en sorte que les spectacles soient créés et qu’ils existent » (et on confie les billets aux Distributeurs que peuvent être la FNAC, Ticket Master, Billet Reduc …), ou faut-il avoir à cœur de gérer soi-même sa propre Billetterie comme nous le disait Gérard Drouot dans un précédent podcast ?

Je sais que c’est un sujet important pour beaucoup de Sociétés de Production.

Jusqu’à présent, j’ai fait le choix de ne pas avoir de logiciel propre ni de billetterie indépendante, tout simplement parce que j’aime bien le côté « artisanal » qu’on a encore… Depuis qu’on travaille en Production, on aurait pu produire beaucoup plus de spectacles (on est longtemps restés à trois spectacles, on en produit maintenant quatre).

Je n’ai pas envie de ça parce que ça permettait moins de souplesse. Une fois qu’on a une grosse société, on est obligé de faire du volume pour pouvoir supporter les frais fixes. Cela ne permettrait pas d’avoir le travail un peu « aux petits oignons » qu’on aime faire avec nos Artistes : gérer aussi bien leurs chroniques à la télé ou à la radio, les captations…

La question se pose maintenant… Si je faisais le choix d’avoir une billetterie, cela signifierait « alourdir l’équipe », me retrouver potentiellement dans une « course à la rentabilité », et y perdre humainement dans les rapports que j’aime avoir avec les Artistes, qui doivent être vraiment simples et directs pour pouvoir les suivre au mieux.

Justement, en parlant des Artistes, j’ai envie de comprendre ce que veut dire « être Productrice » (finalement, on mène tout le temps cette quête dans « Sold Out »). Prenons l’exemple de Vincent Dedienne… Quand vous l’avez « signé », jouait-il déjà sur scène ou avez-vous tout conçu ensemble dès le début ?

Il avait écrit un spectacle qui « tenait déjà très bien la route ». Il avait fait sa petite affiche lui-même (un peu artisanalement), et avait joué (je crois) une ou deux dates en showcase pour justement essayer de faire produire ses spectacles.

La question que tu poses : « Qu’est-ce qu’un Producteur de Spectacles ? », lui-même ne se l’était pas posée.

[Rires] Il m’a raconté que, venant du « subventionné », il pensait qu’il irait « frapper à la porte du Théâtre de la Boussole[Rires] » (je ne sais pas pourquoi… ), et demander à jouer son spectacle…

Plusieurs personnes de son entourage lui ont parlé de nous et de la « Prod’ ». Quand Laurent et moi avons reçu un D.V.D. d’un de ses deux showcases, on a regardé chacun de notre côté le spectacle, on s’est appelés, et on s’est tout de suite dit : « C’est lui ! », (cela faisait deux ans qu’on était potentiellement ouverts à avoir un nouvel Artiste en Production).

Le travail a commencé avec Vincent. Il a fallu un peu lui expliquer « comment ça marchait » parce qu’il était jeune, comme Michaël…

C’était avant Quotidien, avant qu’il ne soit « médiatisé » … Vous l’avez « reniflé » très tôt, en fait…

Oui, c’est vrai.

Justement, ses décisions de faire ou non des chroniques chez Quotidien, d’aller sur France Inter, ont vraiment été réfléchies avec lui. Il était très pressé de jouer : on a dû se rencontrer en janvier 2014, et il était sur scène en octobre.

Le travail a donc consisté à l’écouter, à savoir ce qu’il avait envie de faire plus tard et comment il voyait son avenir…

Vincent a « envie de tout faire » : de la Télé, du Cinéma, du Théâtre, écrire…

Justement, si on s’arrête là-dessus, ce que je retiens c’est qu’on va avec lui jusqu’à réfléchir à ce qu’il va faire dans les Médias… Ça ne s’arrête pas à ce qu’il se passe sur scène…

Tout à fait !

Je pense que ce n’est pas forcément le cas partout. Nous, on fait un peu le « Management des Artistes » : on a ce côté un peu « 360 degrés » que n’ont pas tous les Producteurs.

Dans certaines Productions, il y a parfois un Manager entre le Producteur et l’Artiste. Nous, on a tendance à faire ce job-là. Cela permet de se dire que ce n’est pas forcément « le bon moment pour monter sur scène » si l’Artiste est très pris par telle ou telle autre activité, ou qu’il faut au contraire créer une synergie à ce moment-là parce qu’il va remonter sur scène avec un nouveau spectacle, avoir des films qui sortent, et que « ça peut bien se goupiller ».

Il faut réfléchir…

Venons-en à ce qu’il se passe strictement sur scène (toujours avec l’exemple de Vincent). Pour nos auditeurs qui ont vu le spectacle, c’est assez désarçonnant : il arrive sur scène littéralement tout nu ! Il s’habille, et à la fin, il se déshabille et quitte la scène à nouveau tout nu !

Etre Productrice ou Producteur de Spectacles, est-ce aussi discuter de ça avec lui, en disant : « Tu es sûr, vraiment ? » ou est-ce que ce sont des choses taboues et relevant purement de l’Artistique ?

Ce serait possible, mais nous avons pris le parti que si un Artiste nous plaît et que nous avons envie de le produire, ce n’est pas pour lui faire changer ce qu’il a envie de faire sur scène. On a eu des Artistes qui ont eu des Producteurs qui leur disaient : « C’est super, mais à la fin tu feras plutôt ça et au début, tu feras ça… ».

On peut discuter et avoir des échanges, mais à priori, si on les a choisis, c’est parce qu’on aime ce qu’ils font !

Concernant Vincent, la question de cette nudité s’est posée pour une éventuelle tournée à l’International (cela n’aurait pas été possible dans certains pays, parce qu’ils parlent d’homosexualité, dans d’autres parce que la nudité est taboue…). C’est l’unique cas pour lequel on aurait pu intervenir à ce sujet.

C’est intéressant car c’est une vraie « signature » de cette « boîte de Productions », qui est cohérente avec cette notion de « coup de cœur pour des Artistes ».

Par exemple, on recevait à ce micro Jean-Marc Dumontet, qui lui-même assume totalement le fait d’avoir une « relecture artistique ». Pour lui, un Producteur est aussi quelqu’un qui co-écrit le spectacle, qui coupe, qui « challenge », qui donne vraiment son avis sur presque chaque virgule du texte, ou sur la mise en scène. Ce n’est pas exactement le positionnement de Ruq Spectacles, si je comprends bien…

Peut-être que certains Artistes en ont plus besoin que d’autres aussi…

Exactement !

Notre manière de les accompagner ne veut pas dire qu’on n’a aucune « vision artistique » ! Ça peut se réaliser en présentant des Metteurs en Scène, des Scénographes… Il y a quand même une manière d’accompagner artistiquement le Spectacle qui existe, c’est sûr !

On a parlé de ce qui se passait sur scène, on va maintenant parler de ce qu’il se passe dans les métiers de la Production. Ces dernières années, je crois que tu as souhaité « élargir le spectre » : tu fais maintenant partie du Conseil Professionnel du Centre National de la Musique (C.N.M.), pour regarder les problématiques dans leur ensemble peut-être ?

Oui. Quand on m’a proposé de faire partie de ce nouveau Conseil Professionnel (il a tout juste un an), j’ai trouvé ça intéressant.

Il est en train de se mettre en place. C’est un Conseil d’une quarantaine de personnes qui relève du champ de la Musique : des Editeurs, des Maisons de Disques, des Auteurs, des Salles, des Producteurs, des Diffuseurs de spectacles, des Organismes de gestion collective, des Syndicats, etc… qui discutent des problématiques actuelles pour donner un avis consultatif avant que le Conseil d’Administration ne le vote.

Je trouve ça assez intéressant. Cela permet de prendre un peu de recul sur le métier et son évolution.

Justement, pour parler de « l’évolution de ce métier », l’une des questions rituelles quand on finit « Sold Out » traite du rapport aux jeunes personnes, aux étudiant(e)s, aux gens qui « reconfigurent leur carrière », qui s’interrogent et se demandent s’il faut aller dans le Monde du Spectacle. Question toute simple : quand tu reçois des candidatures pour des stages, quand tu donnes des conseils à des gens « qui ont envie », tu leur dis quoi ? Comment réagis-tu ?

Je les étudie toutes. Je trouve toujours intéressante cette démarche « d’aller vers des métiers qui donnent envie ».

Il m’est même arrivé de prendre des stagiaires alors que je n’en avais pas besoin, juste parce que je trouvais qu’ils avaient des choses à apporter, ou parce que leur profil me plaisait.

Je leur dirais « d’y aller », bien-sûr ! Il ne faut pas se retenir d’essayer !

Ce qui est génial dans ton histoire (et que j’ai appris en t’écoutant aujourd’hui), c’est que tu arrives à produire des Artistes que tout le monde connaît auprès de Laurent Ruquier, en étant passée au départ par l’A.N.P.E. Spectacles… C’est quand même dingue !

Oui, mais c’est rassurant ! C’est normal ! C’est bien que ça se passe comme ça, et je pense que ça peut encore se passer comme ça pour plein de personnes…

Merci beaucoup Sophie !

Je t’en prie ! Merci encore pour ton invitation Marc !

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